Workshop
“Le démonstratif en évolution : variation typologique et changement” /
“The demonstrative in the evolutionary process: typological variation and change”
L’appel à communications prolongé: les abstracts peuvent être soumis au plus tard le 30 avril 2024
Extended deadline Workshop: abstracts may be submitted no later than April 30, 2024
*** [FR] Appel à communications*** [English below]
Le démonstratif en évolution : variation typologique et changement
(https://llcd2024.sciencesconf.org/data/pages/WS4.pdf)
Argumentaire
Les démonstratifs représenteraient une catégorie primitive du langage humain, car universelle et non-dérivée d’unités lexicales (ANDERSON et KEENAN 1985 ; DIESSSEL 1999 ; DIXON 2003). Relevant de ce que BUEHLER (2008 [1934]) appelle « le champ déictique » de la langue, ils remplissent des fonctions primordiales dans le domaine de la communication. Leur position centrale dans la grammaire des langues et leur fonctionnement particulier ont déjà suscité un nombre considérable de travaux dans des cadres très divers, ce qui tend à montrer qu’ils offrent un terrain d’échange privilégié entre disciplines. Font notamment partie des problématiques abordées dans ces travaux : le fonctionnement référentiel indexical propre au démonstratif (cf. FILLMORE 1982 ; KLEIBER 1983 ; HIMMELMANN 1996 ; DIESSEL 1999), son statut morphosyntaxique (cf. CORBLIN 1995 ; HIMMELMANN 1997 ; DIESSEL 1999 ; LEEMAN 2004 ; GARY-PRIEUR 2011 ; VESELOVSKÁ 2014), le rapport entre les démonstratifs et la définitude (cf. HAWKINS 1978 ; LOEBNER 2011 ; LYONS 1999 ; CZARDYBON 2017), les effets sémantiques et pragmatiques que les démonstratifs sont susceptibles de produire (cf. KLEIBER 1991 ; JONASSON 1998 ; ŠIMÍK 2015), leur variabilité typologique dans une approche contrastive (cf. ANDERSON et KEENAN 1985 ; DIXON 2003 ; JUNGBLUTH et DA MILANO 2015 ; LEVINSON 2018), ainsi que les principaux aspects cognitifs, psychologiques et sociolinguistiques de l’interprétation des expressions démonstratives à travers les langues du monde (cf. JOHNSEN 2019 ; DIESSEL 2019 ; DIESSEL et COVENTRY 2020 ; RUBIO-FERNANDEZ, 2022 ; COVENTRY et al., 2023) et le statut tout particulier des démonstratifs dans les processus de traitement de l’information et d’acquisition du langage (cf. CLARK 1978 ; DIESSEL et MONAKHOV 2022 ; CHEN et al. 2023).
Une part importante des recherches envisage également la classe des démonstratifs du point de vue de ses évolutions (cf. GREENBERG 1978 ; HIMMELMANN 1997 ; MARCHELLO-NIZIA 2006a et 2006b ; CARLIER et DE MULDER 2006 et 2010 ; CARLIER et GUILLOT-BARBANCE 2015 et 2018 ; CARLIER 2017 ; GUILLOT-BARBANCE 2017 ; DVORAK 2021 ; PLOCHARZ 2021). Dans ce cadre, l’on s’intéresse aux transformations possibles du système des démonstratifs, à la grammaticalisation du démonstratif en article défini ou spécifique et à l’acquisition par ce dernier de nouvelles fonctions sémantiques et/ou pragmatiques. C’est précisément dans la perspective de la dynamique évolutive que le workshop se propose d’aborder le démonstratif. Par conséquent, sont bienvenues toutes les communications, sans exclusive théorique, qui portent sur un ou plusieurs démonstratifs dans leur rapport à des changements touchant les plans sémantico-référentiel, morphosyntaxique ou pragmatique. Seront également prises en compte les recherches typologiques et/ou contrastives permettant de rendre compte de variations systémiques candidates à de futurs changements. Le thème de la communication n’est limité ni par le choix de l’époque ni par celui de la ou des langue(s)/variété(s) de langue étudiée(s). Nous espérons ainsi faire le point sur une partie des recherches actuellement menées sur ces éléments en France et au-delà.
Nous souhaitons accorder une place centrale aux échanges, notamment entre chercheurs confirmés et jeunes chercheurs, afin que la discussion collective permette un croisement de points de vue propres à autant de branches de la linguistique que possible (syntaxe, sémantique référentielle, pragmatique, linguistique comparée, linguistique typologique, psycholinguistique, linguistique cognitive, sociolinguistique, acquisition du langage). Les approches sur corpus sont évidemment les bienvenues. Voici quelques questionnements théoriques, non-exhaustifs, susceptibles d’orienter la thématique du workshop :
– La définitude telle qu’exprimée par le démonstratif peut-elle être ramenée à celle qui est portée par les descriptions définies dans les systèmes linguistiques qui en disposent (autrement dit : le démonstratif est-il porteur du présupposé d’unicité) ?
– Quelles sont les étapes par lesquelles le démonstratif se transforme en article défini/spécifique ? Peut-on, à cet égard, repérer des régularités dans des langues différentes et mettre à jour le modèle diachronique de GREENBERG (1978) ? Quels sont les critères permettant d’identifier les seuils entre les phases successives de ce processus ?
– Qu’arrive-t-il, au moment de la grammaticalisation du démonstratif en article défini, à la syntaxe interne du complexe nominal ? Le modèle, structuré autour de la notion de « syntagme » (« phrase » en anglais) et bâti sur les langues à fort degré de configurationnalité (cf. CARLIER et COMBETTES ; 2015), convient-il à la description du complexe nominal des langues sans article défini (pleinement) constitué ?
– Au sein de la diversité typologique des langues, peut-on régulièrement identifier des emplois où le démonstratif se caractérise par un flou catégoriel inhérent et où sa catégorisation linguistique pose problème ? On pense ici aussi bien aux hésitations concernant l’attribution d’une catégorie grammaticale à une occurrence démonstrative qu’aux hésitations en matière d’interprétation des occurrences en termes de régime d’indexicalité (deixis situationnelle, endophore, emploi mémoriel, etc.). Quelles approches et méthodologies permettent de lever ces difficultés de « distorsion catégorielle » ?
– L’acquisition par le démonstratif d’effets pragmatiques du type « rejet du référent de la sphère personnelle du locuteur » (cf. MARCHELLO-NIZIA 2003) – effets basés sur la faculté de certaines formes du démonstratif à marquer la distance physique du référent par rapport au locuteur ou l’association du référent à l’espace de l’un des acteurs de l’énonciation – est-il un trait universel de la variation des langues ? Dans quelle mesure la notion d’implicature conversationnelle (GRICE 1975) permet-elle de décrire ces effets dans leur diversité typologique ?
– Quel est le rôle du démonstratif dans la structuration cognitive de l’espace ? Ce rôle est-il substantiellement le même dans les différentes langues ? Le démonstratif en tant que catégorie primitive du langage humain peut-il nous renseigner sur le fonctionnement et la structure de la cognition humaine ? Comment concilier/articuler les approches spatiales et celles qui mettent en avant des facteurs plus pragmatiques ?
– Certaines études remettent en question l’opinion selon laquelle les démonstratifs ne proviennent pas d’items lexicaux (cf. FRAJZYNGIER 1996, HEINE et al. 2020). Les démonstratifs issus de mots lexicaux par grammaticalisation sont-ils différents des autres démonstratifs ? Les récentes études en typologie linguistique peuvent-elles nous fournir des exemples de cette grammaticalisation ? Permettent-elles une meilleure compréhension de celle-ci ?
Modalités de soumission
Les communications peuvent être soumises au plus tard le 30 avril 2024, sur EasyChair. Lien pour la soumission: https://easychair.org/conferences/?conf=llcd2024
Les résumés doivent clairement expliciter les questions de recherche, l’approche, la méthode, les données et les résultats (prévus). Ils doivent être anonymes : non seulement ils ne doivent pas contenir les noms des présentateurs, ni leurs affiliations ou adresses, mais ils doivent éviter toute autre information pouvant révéler leur(s) auteur (s). Ils ne doivent pas dépasser 500 mots (y compris les exemples, hors références bibliographiques). Chaque soumission fait l’objet d’une triple expertise.
*** [ENG] Call for papers***
The demonstrative in the evolutionary process: typological variation and change
(https://llcd2024.sciencesconf.org/data/pages/WS4Eng.pdf)
Workshop description
Demonstratives tend to be regarded as a primitive category of human language since they are universal and non-derived from lexical items (ANDERSON & KEENAN 1985; DIESSSEL 1999; DIXON 2003). Inscribed within what BUEHLER (2008 [1934]) calls “the deictic field” of language, they assume primordial functions in the realm of communication. Their central position in the grammar of languages and the particularities of their functioning have motivated a great number of works in various theoretical frameworks, proving that demonstratives constitute a fruitful field of interdisciplinary dialogue. Linguists are indeed preoccupied with a series of particularly complex issues such as the indexical mode of reference inherent to the demonstrative (cf. FILLMORE 1982; KLEIBER 1983; HIMMELMANN 1996; DIESSEL 1999), its morphosyntactic status (cf. CORBLIN 1995; HIMMELMANN 1997; DIESSEL 1999; LEEMAN 2004; GARY-PRIEUR 2011; VESELOVSKÁ 2014), the relationship between demonstratives and definiteness (cf. HAWKINS 1978; LOEBNER 2011; LYONS 1999; CZARDYBON 2017), the semantic and pragmatic effects produced by demonstratives (cf. KLEIBER 1991; JONASSON 1998; ŠIMÍK 2015) and the typological variability of demonstratives (cf. ANDERSON & KEENAN 1985; DIXON 2003; JUNGBLUTH & DA MILANO 2015; LEVINSON 2018). Some authors also research prominent cognitive, psycholinguistic and sociolinguistic aspects related to the interpretation of demonstrative expressions in a cross-linguistic perspective (cf. JOHNSEN 2019; DIESSEL 2019; DIESSEL & COVENTRY 2020; RUBIO-FERNANDEZ 2022; COVENTRY K. R. et al. 2023) as well as the key role that demonstratives play in information processing and language acquisition (cf. CLARK 1978; DIESSEL & MONAKHOV 2022; CHEN et al. 2023).
An important part of the works also studies demonstratives from the point of view of evolution and change (cf. GREENBERG 1978; HIMMELMANN 1997; MARCHELLO-NIZIA 2006a & 2006b; CARLIER & DE MULDER 2006 & 2010; CARLIER & GUILLOT-BARBANCE 2015 & 2018; CARLIER 2017; GUILLOT-BARBANCE 2017; DVORAK 2021; PLOCHARZ 2021). These works investigate possible transformations of the demonstrative system, the grammaticalization of the demonstrative into a definite or specific article and its acquisition of new semantic and/or pragmatic functions. The workshop proposes to address demonstratives precisely in the perspective of this evolutionary dynamics. Hence, all papers, regardless of their theoretical background, dealing with one or several demonstratives in relation to changes undergone in the fields of referential semantics, morphosyntax or pragmatics are welcome. We also wish to include typological and/or contrastive research capable of accounting for those system variations which are good candidates for change. The topics of the papers are limited neither by the period nor by the language(s)/varieties of language under investigation. Thus, we hope to discuss part of the research currently conducted into these phenomena in France and beyond.
Dialogue will be at the core of our workshop, in particular dialogue between senior and young researchers. This should allow for comparing and discussing views from as many branches of linguistics as possible (syntax, referential semantics, pragmatics, comparative linguistics, linguistic typology, psycholinguistics, cognitive linguistics, sociolinguistics, language acquisition). Corpus-based approaches are most welcome. Here are several questions around which the workshop could be structured (the list is not complete):
– Does the definiteness expressed by the demonstrative boil down to that expressed by definite descriptions in the languages which have them (in other terms: does the demonstrative bear the presupposition of uniqueness)?
– What stages does the demonstrative have to go through to become a definite/specific article? With regard to this transformation, is it possible to pinpoint regularities in different languages and, by doing so, update GREENBERG’s 1978 diachronic model? What criteria can be used to identify the boundaries between the successive stages of this process?
– During the process wherein the demonstrative grammaticalizes into a definite article, what changes does the inner syntax of the noun complex undergo? Does the model, structured around the notion of “phrase” and grounded in the description of strongly configurational languages (cf. CARLIER & COMBETTES 2015), fit the description of the noun complex in languages without a (full-fledged) definite article?
– Amid the typological diversity of languages, is it possible to regularly identify usages where the demonstrative is characterized by an inherent categorical opacity, challenging its linguistic categorization? These cases comprise the attribution of a grammatical category to a demonstrative occurrence as well as the interpretation of occurrences in terms of their type of indexical reference (situational deixis, anaphora, recognitional uses, etc.). What approaches and methodologies allow for surmounting these “categorical distortions”?
– Is the acquisition of pragmatic effects such as “rejecting the referent from the speaker’s personal sphere” (cf. MARCHELLO-NIZIA 2003) – effects based on the ability of some demonstratives to mark physical distance of the referent from the speaker or to associate the referent with the sphere of one of the actors of enunciation – a universal property of language variation? To what extent is the notion of conversational implicature (GRICE 1975) able to account for these effects in their typological diversity?
– What role does the demonstrative play in the cognitive structuring of space? Is this role substantially the same in all languages? Being a primitive language category, can the demonstrative teach as something about the functioning and the structure of human cognition? How to reconcile/articulate approaches based on space and those stressing the importance of more pragmatic factors?
– Some works call into question the view according to which demonstratives do not stem from lexical items (cf. FRAJZYNGIER 1996, HEINE et al. 2020). Are demonstratives derived from lexical words via grammaticalization different from other demonstratives? Can recent studies in linguistic typology provide examples of this grammaticalization process and a better insight into it?
Abstracts may be submitted no later than April 30, 2024, on EasyChair (https://easychair.org/conferences/?conf=llcd2024)
Abstracts must clearly state the research questions, approach, method, data and (expected) results. They must be anonymous: not only must they not contain the presenters’ names, affiliations or addresses, but they must avoid any other information that might reveal their author(s). They should not exceed 500 words (including examples, but excluding bibliographical references). Each submission is subject to three reviews.